La radioactivité au service de la médecine
Dès les années 1950, médecins et physiciens ont perçu le potentiel offert par l’utilisation contrôlée de substances radioactives en faibles doses. La médecine nucléaire a, depuis, bouleversé l’imagerie médicale. Explications.
« De nos jours, annoncez à votre entourage que vous passez un scanner et personne ne s’en offusquera. C’est d’une banalité totale. Dans le cas d’une scintigraphie, en revanche, il y a toutes les chances que famille, amis, voisins et collègues vous regardent d’un oeil inquiet. La médecine nucléaire a tendance à faire peur. » Le Dr Cristian Antonescu, médecin-chef adjoint et responsable du Service de médecine nucléaire de l’HFR, doit encore lutter contre les idées reçues. « La plupart des gens ignorent qu’une scintigraphie ne représente que 20 % des rayonnements d’un scanner. Soit l’équivalent d’une simple radiographie. »
Une partie du travail du spécialiste et de son équipe consiste donc à répondre aux inquiétudes du patient. Et à lui expliquer un processus très différent des autres techniques d’imagerie médicale. « En radiologie, le faisceau est émis par l’appareil et traverse le patient en venant de l’extérieur. Avec la scintigraphie, le rayonnement est émis par le patient lui-même, via l’administration préalable d’un radio-pharmaceutique. Cette substance radioactive, qui joue le rôle d’un traceur, est alors captée par une gamma-caméra, un appareil capable de traduire le signal en images. » Le produit, qui n’a une durée de vie que de quelques heures, est généralement injecté par voie intraveineuse, de manière indolore et sans effets secondaires.
La Suisse à la pointe
Également utilisé en médecine nucléaire, le PET-CT (ou PET-Scan) est une technologie hybride. Elle est composée d’un PET (tomographie par émission de positons), qui fournit des informations sur le métabolisme des cellules, et d’un CT (scanner à rayons X), qui procure des données sur la morphologie et l’anatomie du patient. Les informations récoltées sont ensuite fusionnées, afin d’affiner le diagnostic. « Les premières machines PET-CT au monde ont été installées à Zurich, au début des années 2000. La Suisse a toujours été à la pointe de la recherche en médecine nucléaire », se réjouit le Dr Antonescu.
Si la médecine nucléaire diffère de la radiologie par la méthode, elle s’en distingue aussi par le résultat. « Il s’agit d’une méthode d’investigation fonctionnelle, c’està- dire qu’elle met en évidence le fonctionnement de l’organe analysé. Elle est donc complémentaire aux examens radiologiques, qui fournissent des informations structurelles », précise le médecin.
Des diagnostics et es traitements
Quels sont les champs d’application de la médecine nucléaire? « Plus des trois-quarts des investigations concernent des affections oncologiques : diagnostic et détermination du stade précis du cancer, évaluation de la réponse du patient au traitement et surveillance des récidives. En cas de cancer de la prostate, par exemple, la scintigraphie osseuse fait partie des examens de base. » Mais les scintigraphies permettent aussi d’étudier la perfusion myocardique, d’analyser le fonctionnement des reins, de diagnostiquer une embolie pulmonaire ou encore de mener des investigations sur les maladies dégénératives comme la maladie de Parkinson ou celle d’Alzheimer.
«Notre plateau technique est l’un des meilleurs du pays, hôpitaux universitaires compris»
De plus, des traitements sont proposés pour les maladies thyroïdiennes bénignes et malignes, grâce à la chambre blindée en fonction depuis 2000. Le service a été le premier en Suisse romande à effectuer des traitements au radium pour les métastases osseuses des cancers de la prostate. Les personnes souffrant d’affections rhumatologiques peuvent bénéficier d’injections intra-articulaires de radio-isotopes, afin de soulager l’inflammation.
Sur le territoire fribourgeois, la médecine nucléaire ne se pratique qu’à l’HFR Fribourg – Hôpital cantonal. « L’investissement à consentir est important », justifie le Dr Antonescu, qui dispose d’un équipement complet et de premier ordre : une chambre blindée, un laboratoire, un injecteur- doseur, trois gamma-caméras (dont deux de dernière génération) et un PETCT. « Notre plateau technique est l’un des meilleurs du pays, hôpitaux universitaires compris. Lors de mon arrivée en 2003, seuls quatre types d’examens diagnostiques étaient proposés ici, à Fribourg. Aujourd’hui, nous en comptons 35, soit la gamme complète, pour environ 2’500 patients par année. En plus d’entretenir de très bonnes relations avec le CHUV, à Lausanne, et l’Hôpital de l’Île, à Berne, nous jouissons d’une excellente réputation. »